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  • : Les cahiers des diables bleus
  • : Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie, d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.
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Saïd et Diana

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Texte Libre

Texte Libre

Image de Dominique par Louis

  Ecrits et dessinés à partir de nos banlieues insoumises toujours en devenir

      Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.

      Bienvenue à vos p'tits messages tendre ou fous à vos quelques mots grognons du matin écrits vite fait sur le dos d'un ticket de métro à vos histoires tracées sur la vitre buée d'un bistrot, à vos murmures endormis au creux de vos draps complices des poussières de soleil passant par la fenêtre entrouverte...

      Bienvenue à vos fleurs des chantiers coquelicots et myosotis à vos bonds joyeux d'écureuils marquant d'une légère empreinte rousse nos chemins à toutes et à tous. Bienvenue à vos poèmes à vos dessins à vos photos à vos signes familiers que vous confierez à l'aventure très artisanale et marginale des Cahiers diablotins.

      Alors écrivez-nous, écrivez-moi, écrivez-moi, suivez-nous sur le chemin des diables et vous en saurez plus...

 

                                          d.le-boucher@sfr.fr


Notre blog est en lien avec celui
de notiloufoublog 2re illustrateur préféré que vous connaissez et on vous invite à faire un détour pour zyeuter ses images vous en prendrez plein les mirettes ! Alors ne loupez pas cette occase d'être émerveillés c'est pas si courant...

Les aquarelles du blog d'Iloufou l'artiste sans art  sont à déguster à son adresse                   www.iloufou.com  

21 avril 2008 1 21 /04 /avril /2008 16:52

Ce journal de Palestine nous l'avons tenu en 1993 au moment où les pourparlers de paix avaient lieu et nous comme tant d'autres on y croyait très fort... Marc photographe dans les années 70 en ensuite est parti préparer un livre témoignage en prenant des photos à Gaza et à Jérusalem juste avant la signature des accords de paix d'Oslo... Notre bouquin n'a jamais vu le jour... voici des extraits de ce qu'il aurait pu être... en vrac...Photo Marc Fourny  1993 Gaza Camp de Khan Younis
       Extrait du livre de Racha Salah L’an prochain à Tibériade publié en 1996 aux Ed. Albin Michel

      “ Nicolas, aujourd’hui Gouayr n’existe plus. Il a été rasé après le départ de notre tribu, le campement est devenu terre agricole. Non loin de là, les Israéliens ont construit une ville nouvelle, tout en dur, qu’ils ont appelée ‘ Majdal Garosar ’, m’a dit mon père. Je voudrais y aller. Voir ce lieu au moins une fois dans ma vie pour retrouver les endroits où ma famille vivait. Constater par moi-même que ce pays, imaginé, ressemble bien à l’idée que je m’en fais : un grand lac aux eaux claires, bordé par des vallons verts recouverts d’oliviers et d’orangers. ”

Extraits de Journal 93
      ( … ) Pour moi je crois que la seule chose que je pourrais dire aux Palestiniens c’est que la souffrance dans la chair d’être “ hors de soi ” qui va avec “ hors de chez soi ”… la sensation aiguë de ne pas pouvoir habiter son corps la coupure nette entre le désir la volonté qu’on en a et ce qui est impossible parce que tout autour se construit contre soi… cette souffrance je la connais… C’est tout ce que j’ai connu du monde en moi pendant 30 ans ce que certains appellent “ folie ” n’est parfois qu’une façon qu’on a de nous arracher la peau… Nous dépouiller c’est ça ?… Nous dépouiller de notre passion frénétique à être… être ensemble sans laquelle on n’est que la somme d’égoïsmes accumulés… Etre ensemble avec la chair et le jardin… Avec l’autre cet étranger dont je connais tout sans rien connaître…
      Mais je crois que c’est plus facile d’être une folle solitaire et marginalisée que d’être emprisonnés dans la démence d’un “ nous ” “ notre peuple ” “ nos martyrs ” emprisonnés par ce que ceux d’en face renvoient d’eux-mêmes en direction de ce camp de ces quelques centaines de mètres carrés où la réalité quotidienne est décidée programmée manipulée par d’autres… car depuis combien de temps les Palestiniens n’ont-ils pas été libres d’organiser sur leur terre un Etat où exister à leur convenance comme c’est le cas de la plupart des peuples ?
      Pour les jeunes Israéliens bientôt la question sera : comment répondre quand nous ne répond plus à ta place ? Quand soudain la certitude de l’infaillibilité de l’héritage est prise en défaut parce qu’elle ne débouche que sur de la mort… Quelle terrible violence faite à des corps encore enfants qui au lieu de découvrir la marque inaliénable de l’amour découvrent celle de la terreur… Ici se poursuit l’héritage et je ne te parle pas des enfants palestiniens qui ne sont eux depuis la naissance qu’une blessure… Programmés blessés… Alors qu’est-ce qu’on peut faire en face de ça mon petit frère ?… ( … ) DomPhoto Marc Fourny  Jérusalem 19993

Lettre de Marc, Juillet 1993


Salut Dom,

      Juste quelques mots ( tu vas voir, tu l’as voulu ma vieille… ), pour les dernières nouvelles. Et puis quand même faut bien dire que ta lettre m’a exaspéré ! Non, moi j’écris pas… Moi je suis abonné aux 9 heures frangine ! Moi je suis le tourneur sur un tour très perfectionné de pièces en terre pour des poêles suisses à bois censés chauffer à mort les familles congelées dans leur trou noir et leurs vieilles rancoeurs. Alors la terre comme symbole moi l’ouvrier ça me laisse plutôt froid si ça t’ennuie pas… Non, tout ça c’est pas vraiment vrai mais quand même tu pousses un peu !
      Alors donc, moi je pars comme prévu sans toi en Israël ( ou plutôt en Palestine ) si tout se passe bien fin août et j’espère y retourner pour plus longtemps fin de l’année car pour l’instant je suis raide niveau fric, malgré nos efforts d’organisation de notre projet… Tiens, ça y est je regarde que je viens d’écrire Palestine entre parenthèses et ça me fait penser à ce que je t’ai demandé un jour… Oui tu sais ma question sur pourquoi tu dis toujours Palestine alors qu’on entend partout parler de l’Etat d’Israël ?
      Ta réponse : “ Palestine c’est la terre comme celle du jardin de mon enfance aussi familière aussi douce aux lèvres et à dire ” … un truc comme ça ? Mais pour moi c’est compliqué et “ politiquement ” Palestine ça me dit rien tandis qu’Israël ça me dit autant que colons en Algérie. Ce sont toujours les mêmes qu’on écrit dans la parenthèse… Même pour un anarchiste comme moi ce sont ceux qui construisent un Etat qui donnent un nom à un pays. Toi tu dirais paysage…Photo Marc Fourny  1993  Enfants palestiniens jouant au cerf-volant à Gaza

Extrait du livre de Racha Salah L’an prochain à Tibériade

 

       “ Comme toutes les femmes du campement, ma grand-mère travaillait aux champs. Quand elle parle de sa terre, elle emploie le mot ‘ Dounia ’ : ‘ monde ’, une manière de nous préciser, à nous ses petits-enfants, que nous possédions alors un domaine immense. De combien d’hectares ? lui a un jour demandé l’une de mes cousines. Oum Salah n’a rien répondu. Les chiffres ne font pas partie de sa culture. La seule chose dont elle soit sûre, c’est que c’était une terre ‘ immense comme un monde ’, où elle cultivait de beaux fruits et légumes : aubergines, tomates, laitues, pommes et bananes. ”Photo Marc Fournt 1993 Portrait de jeune palestinienne à Jérusalem

Lettre de Marc, Juillet 1993 suite

      C’est vrai que tout ça n’est pas un jeu et j’ai de petites angoisses des fois en y pensant. Ce que je vais faire là-bas ? C’est pas des questions à poser à quelqu’un qui a seulement un CAP de mécanicien et qui a déraillé pile au moment où il a vu son copain de 14 balais pareil que lui dans l’atelier se faire prendre les doigts dans la fraiseuse et ressortir en hurlant.
avec un truc sanglant à la place de sa main… Depuis comme tu sais j’ai pas arrêté de fuir toutes les fraiseuses de la terre qui ratatinent les paluches des gamins voilà le hic…
      Et justement y a un trou immense dans la marée de ceux qui refusent de se taire devant le silence des hommes au cœur sec et à la liberté éteinte… Moi je suis dans ce trou et je ne sais pas pourquoi je crie quand je crie tout seul. Mais les mots, mes mots sont impuissants… Ils faut que je continue pourtant. Alors les images… peut-être que j’y vais à cause de tout ce qu’on a vécu avant, Che, la révolution des œillets, la Fraction Armée Rouge, le Larzac et nous avec nos rêves qu’on a pris en main de ces terres sauvages et de l’insoumission…
      Moi en refusant de porter les armes pour le défendre, j’ai refusé à ce pays d’avoir des droits sur moi. “ Son héritage guerrier ” comme tu dis, j’en ai jamais voulu. Mais c’est dans les cellules de l’armée que j’ai vraiment eu la trouille. Tu as vu que j’étais pas joli à cet instant-là… Tu sais, quand un copain à moitié fou se fracasse les poings contre les murs de sa cellule juste à côté tu flippes secos… Encore des doigts écrasés ça me suit… Rien à voir avec les camps de torture du Néguev, je sais… Moi tout ce que je peux donner aux Palestiniens c’est ma trouille et ma fragilité. La force ils l’ont, mais un regard qui connaît leur angoisse de la honte, de l’abandon du combat, de la mort programmée par d’autres et que tu n’arrives plus à chasser, car tout ça je l’ai eu dans le ventre… Je ne répond peut-être pas à ta question… mais si pourtant…
      Je n’ai pas encore bien défini la direction que je vais prendre, sur la bande de Gaza ça va assez mal. En l’espace d’un mois ils ont arrêté un cameraman de Reuter (  faut dire qu’il avait un nom arabe, ça aide pas… ) et tiré sur des photographes de l’AFP, de Sigma et de Contact, plus un cameraman de France 2 arrêté. Tout ça dans les camps de Rafah et Chatti, et tu rajoutes le journaliste anglais… Bon même si je ne fais pas du tout partie de la bande des “ tirailleurs ” venant aussi faire du cliché spectaculaire qui va le savoir ? Et puis en quoi ça me rendrait sympathique à des militaires aussi tarés que tous ceux de la sorte ? Pourtant c’est que je compte bien rester un homme vivant moi !
      Au début je pensais aller de Tel Aviv à la Bande de Gaza mais je suis indécis. D’un côté je n’ai pas vraiment le projet de faire du “ New”, d’un autre côté c’est un des points clef du problème palestinien et je ne suis pas prêt pour ça. Je veux suivre au plus près ce dont on a causé mais comment ne pas voir aussi que des gens crèvent à cause de la culpabilité silencieuse ( vis-à-vis des Juifs ) que nous ont refilée nos vieux ? ( … )
Photo Marc Fourny  1993  Jeunes enfants palestiniens à Jérusalem
A suivre...
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