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  • : Les cahiers des diables bleus
  • : Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie, d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.
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Saïd et Diana

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Texte Libre

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Image de Dominique par Louis

  Ecrits et dessinés à partir de nos banlieues insoumises toujours en devenir

      Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.

      Bienvenue à vos p'tits messages tendre ou fous à vos quelques mots grognons du matin écrits vite fait sur le dos d'un ticket de métro à vos histoires tracées sur la vitre buée d'un bistrot, à vos murmures endormis au creux de vos draps complices des poussières de soleil passant par la fenêtre entrouverte...

      Bienvenue à vos fleurs des chantiers coquelicots et myosotis à vos bonds joyeux d'écureuils marquant d'une légère empreinte rousse nos chemins à toutes et à tous. Bienvenue à vos poèmes à vos dessins à vos photos à vos signes familiers que vous confierez à l'aventure très artisanale et marginale des Cahiers diablotins.

      Alors écrivez-nous, écrivez-moi, écrivez-moi, suivez-nous sur le chemin des diables et vous en saurez plus...

 

                                          d.le-boucher@sfr.fr


Notre blog est en lien avec celui
de notiloufoublog 2re illustrateur préféré que vous connaissez et on vous invite à faire un détour pour zyeuter ses images vous en prendrez plein les mirettes ! Alors ne loupez pas cette occase d'être émerveillés c'est pas si courant...

Les aquarelles du blog d'Iloufou l'artiste sans art  sont à déguster à son adresse                   www.iloufou.com  

8 novembre 2007 4 08 /11 /novembre /2007 01:54

                 Les Djenoun de la périféerie

      On  veut juste vous informer de l'expo des illustrations de Louis que vous pouvez admirer sur notre blog depuis deux piges qu'il existe et qui durera quinze jours du 15 novembre au 30 à la librairie Résistance, un espace magique où des gens se bougent, alors malgré cette semaine de grève qui s'annonce bien bien... ou plutôt à cause d'elle venez voir les aquarelles de l'ami Louis, vous ne regretterez pas !

      On y sera samedi 17 novembre à 17 heures 30 et dans la soirée pour vous accueillir et vous raconter des histoires de notre banlieue métisse...

On vous attend !

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3 novembre 2007 6 03 /11 /novembre /2007 00:02

Suite de Samedi, 25 Août 2007 Epinay Rien à dire

      C'est drôle... avant d'avoir entendu Deleuze parler de cet acte de résistance qu’est la création j’avais décidé que notre prochain Cahier des Diables bleus qui paraîtra au mois de mars 2008 et qui fêtera l’anniversaire des 40 ans de Mai 68 s’intitulerait Résistances… Notre meilleur moyen de répondre comme toujours à la barbarie des temps étant de plonger à fond nos doigts dans les géantes bouteilles d’encre de couleur et de bomber les murs béton gris de nos cités d’oiseaux aux ailes libellules et cerises de mai…

        Les peintures de Vincent sont des actes de résistance contre une famille et une éducation religieuse bourrées d’interdits… contre la morale étroite des autres… contre une société bourgeoise conventionnelle et réactionnaire qui a donné à chaque rue dans la ville de naissance du peintre Vincent le nom d’une personne qu’il a connue qu’il a aimée mais Sien la femme prostituée qu’il a protégée de la haine des bien-pensants qu’il a hébergée et nourrie avec ses enfants… Sien qui a posé pour Sorrow le portrait terrible ce crayon noir du noir effrité charbon de l’ennui et du désespoir Sien n’a pas de rue parce qu’elle était une putain…je l’ai écrit dans un de mes bouquins où je causais encore de la peinture qui a été pour un moment de ma vie toute ma vie… Squatt d’encre rouge

        “ Une femme enceinte qui se prostitue. La Haye. Les bourgeois la regardent. Il y a des plantes vertes qui bouffent le ciel. Petits ils sont dans leur boîte pleine de choses. On les entend couper la vie des autres avec leurs dents. Vincent est si pauvre. Sien. Elle n’a plus rien de la beauté qu’ils croient… Son ventre et ses seins gardiens des rivières. Sans flics. Barbare. Elle expose son corps. Il peint. Il peint dans la pluie. Sien. Les vitrines rouges des boucheries d’Amsterdam ne la boufferont pas. Sien. Tu portes un nom de terre brûlée et de sacrilège. Sacrilège de Pauvreté parée seulement du petit bout rose de tes seins. ( … )

       Sorrow. Dans le sang de Vincent. Il y a la folie qui me ressemble. Sien ira se noyer quelque part. Le ventre des bourgeois s’agite. Les putes derrière les vitres bien gardées. Flics. Sardines. Avec une calculatrice pour ne pas trop… Une… deux… trois… j’irai dans les bois… Combien ? Dans la ville de Vincent chaque rue porte le nom de quelqu’un qu’il a connu. Aimé. Peint. Mais Sien n’a pas de rue. Sien n’a pas de rue. C’était une prostituée. Comme toutes les femmes. Comme moi. ( … ) ”

          Les peintures de Vincent sont des actes de résistance contre les stéréotypes du dessin et de la peinture en vogue dans les ateliers à son époque… un de ces ateliers de Montmartre où on lui reprochait de ne pas savoir dessiner… contre une société qui favorise les inégalités et la misère sociale lui qui se sentait camarade des paysans et des mineurs du Borinage… et contre tout ce qui voulait limiter sa liberté et puis contre la médecine psychiatrique pour finir… Si l’œuvre de Vincent me touche tant c’est justement parce que chaque dessin chaque peinture est un acte de résistance qui répond à un interdit à une forme de mépris ou de réduction de l’idéal qui menait la totalité de son être et qui était à ses yeux inaliénable…

      Chacun des dessins chacune des toiles de Vincent exprime avec des résonances désespérées ou ardentes sa résistance et sa singularité souveraine dans un domaine précis où il rejoint la souffrance les refus et les luttes d’autres êtres humains dont il est par sa création solidaire.

         Les mangeurs de pommes de terre et les dessins des ouvriers et paysans du Borinage sont des œuvres proches de la misère paysanne et ouvrière du Nord… les dessins de Sien sont proches de la condition des prostituées et de leur exploitation dans les bordels les maisons de passe les rues crasses des villes… proches de l’esclavage des femmes… Mais les autres peintures réalisées à Arles et dans le Sud chacune avec leurs différences chromatiques si riches et leurs lumières éclatantes rompent avec quelque chose de convenu d’ordinaire et de soumis à notre habituelle condition…

        Que ce soit La chambre avec la tache rouge feu et sang de son édredon La pipe ou La petite chaise de paille et leurs jaunes et verts citron brûlants acides et crus La nuit étoilée où toute la puissance cosmique du monde éclabousse des bleus du désert aux spirales météores nos regards éblouis Le café à Arles avec ses couleurs de grenades tranchées et d’absinthe ou L’homme à l’oreille coupée et son “ funeste coquillage ” et puis tant d’autres… y a toujours la nécessité d’exprimer et de répandre sur la toile cette vitale énergie constamment bridée comme la course d’un cheval sauvage qui galope dans l’écume au crépuscule et qui fait jaillir des minuscules éclats de pierres écarlates du soleil… cette passion de l’être à vouloir et à exiger de vivre à la hauteur de son rêve qui l’anime et à ne pas demeurer une bête de somme misérable…

       Me semble que c’est sacrément d’actualité tout ça… Les dernières peintures de Vincent à Auvers-sur-Oise sont comme les lettres de Camille Claudel à l’asile de Montdevergues et ses ultimes sculptures juste avant son internement des actes de résistance vis-à-vis de ce que la société a mis au point pour se protéger de ce qui remet en question l’uniformité des êtres dans un destin toujours malheureux et inaccompli et réclame son droit à l’intelligence et au bonheur : l’enfermement dans les asiles d’aliénés…

      Le champ de blé au corbeaux comme en cause si juste d’ailleurs un certain Antonin Artaud dans son texte Vincent Van Gogh le suicidé de la société… un chant de vie incroyable juste avant de se faire la malle.. Artaud qui devait lui aussi résister à cette forme d’incarcération a écrit des paroles si proches dans la même sonorité et les couleurs si terribles de Vincent les mots si luisants de Monsieur Antonin comme le Sakountala de Camille Claudel dont le plâtre a fini de pourrir dans une cabane de jardin du Musée de Châteauroux mais dont le bronze étincelant de rosée a réveillé les muses endormies du jardin du Musée Rodin donnent raison à Malraux en traversant malicieux et rebelles la mort…     

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27 octobre 2007 6 27 /10 /octobre /2007 12:42

Samedi, 25 août 2007 Epinay        Rien à dire 

                                            A  Zyad et à Bouna morts il y a deux ans électrocutés à Clichy-sous-Bois Morts pour rien !Deleuze dans Ça ira quand même :  

        “ La bêtise n'est jamais muette, ni aveugle. Si bien que le problème n'est plus de faire que les gens s'expriment, mais de leur ménager des vacuoles de solitude et de silence à partir desquelles ils auraient enfin quelque chose à dire. Les forces de répression n'empêchent pas les gens de s'exprimer, elles les forcent au contraire à s'exprimer. Douceur de n'avoir rien à dire, droit de n'avoir rien à dire, puisque c'est la condition pour que se forme quelque chose de rare ou de raréfié qui mériterait un peu d'être dit. ”

           En regardant et surtout en écoutant puisque c’est tout le contraire d’un spectacle une des interventions de Deleuze sur le cinéma enregistrée en 1987 j’ai pioche une phrase parmi tout ce qui se disait et y en avait tant d’autres que j’aurais pu picorer… une phrase qui me touchait avec sa justesse et sa façon si humaine de s’adresser aux gens… Des mots qui font écho à ce que j’ressens quand je songe à la création mon total souci depuis toujours…

           En causant de ce qu’on appelle l’œuvre d’art qui est déjà un drôle de mot quand on pense à la toile blanche de Cy Tombly et à ses 2 patates d’euros et au baiser rouge que Rindy Sam la jeune femme cambodgienne peintre aussi mais plutôt fauchée lui a offert condamnée pour vandalisme… donc en causant des œuvres d’art Deleuze dit qu’elles sont d’une certaine manière un acte de résistance et il cite lui-même Malraux à qui ont peut faire crédit de son engagement dans les Brigades Internationales durant la guerre d’Espagne qui affirmait que l’art est ce qui résiste à la mort et sans doute ce qu’il reste de nous…

          Sans le savoir enfant et ados j’étais un être révolté à temps complet avec un gros sac de silence qui écrasait des fois des mots cassés fracassés hurlés et puis à nouveau c’était l’autisme et le désespoir à donf mais y a tant d’enfants qui vivent ça et qui ne dénichent pas les pistes désertes de la création pour se tirer de là et du reste… M’affirmer c’était commettre des actes de résistances informels mais ils étaient dans mes tripes aussi absolument vitaux que ça a été vital ensuite de barbouiller sur des toiles blanches des choses rouges comme un baiser pour marquer le blanc vide de la détresse autour sur moi partout dedans à mort… la mort déversée par les autres sur un corps d’enfant vivant terrible !            C’était une lutte finale trop inégale c’était mes premiers dessins gribouillis aussi tôt que l’ont fait ceux qui ont du génie et avec eux j’ai survécu à la folie je crois c’est tout… Deleuze nomme deux actes de résistances la lutte humaine pour sa liberté et l’œuvre d’art et les deux dans ma vie sont étroitement liés toujours ça n’a fait qu’un Vincent et la Commune de Paris Goya et les anarchistes espagnols du POUM et de la CNT… Me demandez pas pourquoi c’est à l’intérieur du silence de la terre ocre rouge quand je bricolais les premières céramiques et qu’en y mettant le feu j’imaginais qu’elles seraient immortelles…

           Le combat des mineurs des ouvriers des fonderies ou des manœuvres de l’industrie automobile pour leur liberté et leur dignité a tout à voir avec Guernica de Picasso et d’ailleurs je salue drôlement le dessin de la bagnole Guernica dans Charlie-Hebdo en hommage aux types de chez la Renaud et la Simca qui ont pété un câble et Hop Hop ! se sont tirés de cette démence à machiner du rien qui a bouffé leur vie jolie saloperie… ou avec Citoyens de beauté et Matinale de mon peuple de Jean Sénac. Les artistes qu’il dit Deleuze ils créent parce qu’ils en ont besoin et pas autre chose et c’est ça qui rejoint le combat que des hommes dans la lutte sociale et vitale ouvrière mènent en commun alors que le créateur lui c’est un solitaire il a largué la meute il peut plus et pourtant il vit pas s’il ne communique pas avec son art même dans la zermi c’est ça qu’il veut être avec les autres tout près les aimer les sentir les toucher !…

           Besoin d’être avec les autres et de se serrer fort les paluches au-dessus du trou de la mine quand ça descend net et qu’en bas tu te fais niquer tes poumons et ton souffle pour des choses pour du rien pour des impostures grotesques… besoin de virer tout le bazar ensemble et de mettre à la place des mondes où le matin on se réveille avec le camarade soleil qui nous lèche les arpions à midi et c’est bon et c’est chaud comme la cerise écarlate du baiser  de Rindy “ Cette tache rouge sur l’écume blanche est le témoignage de cet instant : du pouvoir de l’art. ” Un baiser un geste d’amour si proche si rebelle dans un monde de glaciation à fric c’est une chance donnée aux gens qui passent par là de cesser de crever de froid et d’enfermement à l’intérieur de leur peau…

           Ouais c’est clair toute œuvre d’art est un acte de résistance et tout acte de résistance est une œuvre d’art… une œuvre d’art populaire qui monte de la rue et qui n’a pas fini de barbouiller de rouge sang feu folie et poésie la toile blanche à mort du pouvoir auquel on va donner d’autres réponses que notre suicide… les réponses de la rue aux cuissardes rouges dans la nuit noire dessous de nos rêves nus c’est extra !

A suivre...

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23 octobre 2007 2 23 /10 /octobre /2007 17:11

                                La belle étrangère

Ecoute… écoute…

Elle vient juste de sauter dans l’autobus d’Afrique… on n’peut pas l’appeler autrement… une des bétaillères de la banlieue Nord-Est après l’avoir quitté lui et la fille au sang chaud qui offre ses grenades et ses bombes aérosol en face des Studios Eclair comme une qui cherche à faire un casting rien que ça pour débuter et puis après… elle les emportera tous dans son mouvement irrésistible des hanches et dans c’regard étonné qu’elle pose sur eux… elle… la belle étrangère…

Les Studios Eclair c’est là qu’on a tourné les scènes où l’Canal serrait les gens à la gorge avec son foulard de brumes graves comme si c’était vrai… Les scènes du film Hôtel du Nord dans les Studios Eclair c’était des décors qu’on n’peut pas croire… la passerelle métal verte et sa mousse par-dessus… le pont tournant pour qu’les péniches elles se coulent dedans le petit boyau étroit pareil un trou de lézard jusqu’à l’estomac d’l’écluse où ça gargouille vrombit éclabousse postillonne à fond… et qu’elles mangent l’eau de leur museau de bois…

Et même l’eau du Canal avec son atmosphère qui prend la gorge entre ses deux mains fraîches et vous caressent doucement doucement…

 

Lui juste après l’avoir quittée il reprend la rue qui monte entre les tours qui fricotent avec le ciel en se demandant si c’est parce qu’il vit ici depuis tellement longtemps qu’il ne voit plus les choses de ce regard d’étrangeté qu’elle pose sur tout comme la rosée le matin.

Deux mains fraîches qui vous caressent doucement et vous donnent envie de partir là où y a du grand soleil généreux un peu hirsute… Son atmosphère qui racle en dedans de la gorge et l’accent des Faubourgs qu’on n’peut pas imiter… Oui même l’atmosphère de l’eau du Canal ils l’ont reconstituée dans les Studios Eclair où on fait encore du cinéma mais plus pour longtemps.

Ecoute… écoute…

 

“ Les Saules ”… c’est là qu’ils descendent… deux… peut-être trois garçons à la peau chocolat fine tendue comme celle des gazelles d’Afrique qu’elle voit partout sur les trottoirs ici et qu’elle retrouve avec bonheur à chaque fois. C’est comme si elle pouvait faire le voyage pour Bamako… Lomé… ou pour un village du Sud d’Africa pareils à ceux qu’il y a dans les films d’Ousmane Sembène… Leurs noms elle ne s’souvient pas… les villages et les termitières totems rouges… les marchés avec les cuvettes les bassines plastique toutes les couleurs et les tissus aussi dans les tons vifs et les ombres brûlantes qui l’éblouissent… La zermi elle est autrement là-bas comme celle des bidonvilles avant elle éclate de rire et de grenades rose écarlate et l’invention elle est partout même si c’est pas forcément la vie qu’on rêve…

Deux trois garçons qui se tirent direction le collège juste à côté ils sont nés ici et la savane rouge ils n’la connaissent pas plus que moi la honte ! Leurs darons ne retourneraient pas c’était sûr… l’billet d’avion il est bien trop cher et puis les jeunes eux ils ont leurs frangins ici dans la cité ils sont mélangés chocolats cafés au lait pains d’épices et avec les Gaulois et les yeux bridés aussi depuis qu’ils sont p’tits et ils préfèrent qu’est-ce qu’ils iraient faire là-bas ouala la galère !… Dans leurs survêtements blacks ils tracent entre les gens qui n’s’occupent que de prendre les places vides ils descendent sautent sur le trottoir macadam… y’en a un qui tchipe sans s’retourner vers un gros type qui veut monter et le bouscule d’son estomac d’otarie et ils courent… courent jusqu’à l’angle où le bus qui les dépasse les perd et elle aussi… 

L’autobus le 154 la bétaillère dans laquelle elle saute deux fois par semaine parmi les gens qui habitent la ville autour des Studios Eclair où on fait du cinéma et d’où parfois mais pas souvent on voit des acteurs sortir avec l’allure et qui s’engouffrent au fond d’leurs carrosses chauffeurs noir métal elle l’aime bien parc’qu’il est rempli bourré de gens qui ont des histoires et on peut lire dans leurs corps ébène et ambre des légendes magnifiques… leurs corps encore proche d’Africa et de sa sauvage douceur tatoués dedans des songes et des récits anciens qu’ils ne raconteront pas…

Elle l’aime bien même si c’est pas facile de courir et de sauter là-d’dans après l’avoir quitté lui et sa belle étrangère qui n’veut pas la laisser partir… Elle l’aime bien l’autobu le 154 la bétaillère de la banlieue Nord-Est où elle s’entasse quand c’est samedi avec les femmes et la beauté d’Africa qui lui saute dessus et la mord… Les femmes d’Africa d’la banlieue et leurs robes sur leurs hanches incroyables et leurs seins nourriciers leurs turbans et leurs bijoux leurs pupilles d’ombre aussi poussiérées d’or leurs éclats de voix et leurs rires qui lui retirent la tentation d’être ailleurs…

Elle l’aime bien même si elle sait qu’les êtres qui crèchent de l’autre côté des terrains vagues où on vide les grands sacs de gravats des morceaux cassés des tours qu’on a construites hier où ils ont grandi n’donnent pas comme ça leur confiance et leur parole aux autres ceux qui s’ramènent avec le matos à l’épaule dans leur territoire pour faire du mauvais cinéma où les histoires d’la périphérie sont écrites au coût du sang par des chasseurs d’ivoire qui ont jamais lu Rimbaud… 

 

A suivre...

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16 octobre 2007 2 16 /10 /octobre /2007 02:18

Lundi, 15 octobre 2007  « Entrez dans la danse… »           D’ordinaire je vous parle de notre cité d’Orgemont à Epinay dans ces petites chroniques sauf quand y a urgence ou bien que des histoires formidables viennent à ma rencontre dans les jours où je vagabonde de Paris sur Seine à notre banlieue et là c’est le cas surtout qu’il s’agit d’un endroit que vous connaissez bien… La Gare du Nord ça ne vous dit rien ?… Je sais c’est souvent que je vous en cause depuis que j’y ai croisé le destin incroyable de Marion et du chien Sentinelle ( voir article précédent… ) mais ce coup-ci je crois bien que vous aller rire vu qu’il s’agit encore de nos douloureux et amoureux transports en commun de banlieue !

Donc mercredi après-midi comme tous les mercredis je retourne du côté de notre cité où l’ami Louis m’attend en essayant de dormir un peu pour récupérer le lever à l’aube des gens courageux et je passe comme des milliers d’entre-vous tous les jours dans le hall de la Gare du Nord le coin qui se trouve à la sortie de la ligne 4 du métro avec ses marchands de journaux et de fleurs… ouais des fleurs je n’risque pas d’aller lui en acheter malgré que ça soit mes copines depuis toujours les fleurs mais c’commerçant-là comme la plupart de ses congénères d’ailleurs je le kiffe pas du tout… Que je vous explique…

J’arrive à l’endroit qui fait une petite agora juste au bas des escaliers qui montent direction de la verrière et des palmiers ébouriffés là où on a droit à des contrôleurs de tickets tout neufs et qui fonctionnent si bien que la porte de communication est toujours ouverte sinon y a des embouteillages aux tourniquets enfin la galère habituelle quoi… Et là je vois quoi juste sous les escaliers qui montent au niveau au-dessus et pas loin du marchand de fleurs hargneux bête justement ?… une bande de jeunes multicolores blacks rebeus chinois gaulois et autres qui ont installé leur sono et qui dansent chacun leur tour une de ces danses hip-hop dont je n’sais pas le nom mais c’est extra !

Autour d’eux les gens qui viennent ou qui retournent dans la banlieue ils font le cercle et tout le long des escaliers et sur la passerelle aussi on est bien deux cent peut-être plus à regarder et à s’en mettre plein les yeux tellement qu’c’est trop bien et les gens applaudissent à chaque numéro et jettent des petits sous… c’est la teuf à donf dans notre Gare enfin ! Et là en mattant les visages réjouis et surpris mine de rien je me dis que j’ai bien raison… ouais les gens d’la banlieue ils aiment ça cette musique et ces danses-là qui causent et qui nous enchantent d’Africa et ils en veulent et de la teuf aussi !

Ça dure bien un quart d’heure et je surveille alentour vu que je sais qu’les mâtons vigiles d’la Gare n’sont jamais loin mais là j’me tape une sacrée surprise en remarquant à quelques mètres de moi trois keufs qui écoutent aussi la zikmu d’la zone sans moufter sans la ramener et sans jouer de la matraque ! Eh dis-donc ça adoucit vraiment les mœurs alors ! je me dis… Et soudain qu’est-ce que je vois qui rapplique tout haineux et colère comme pas deux ? Le marchand de pâquerettes qui commence à prendre le chou aux keufs qui n’disaient rien et patati et patata !

“ Bon alors là faut faire quelque chose… c’est pas vrai ça c’est juste devant mes fleurs leur truc !… Faut que j’aille me battre alors ?”

Les keufs ils me semblent pas enthousiastes du tout de se bouger vu que les gens apprécient drôlement et qu’ils risquent de provoquer encore un bazar comme ils font à chaque fois qu’ils se mêlent de mettre de l’ordre à leur façon… Drôle mais ils ont pas la hargne eux ni l’agressivité à fleur de peau comme on les voit souvent… Non pas du tout… Ils écoutent le type qui vocifère en essayant de temporiser et puis comme un des jeunes a pris le micro pour donner le nom de leur groupe et l’adresse où on peut aller les voir danser un des keufs se dirige mollement vers lui et lui parle tranquille que le vieux râle pour ses ventes et s’ils peuvent aller un peu plus loin…

Pas grave vu que la représentation est finie et que les jeunes ravis ont ramassé pas mal de monnaie et nous on a eu un spectacle d’enfer alors tout l’monde retourne cool prendre son transport avec plein de rire dans la tête et dans les yeux !

Tout ça pour vous dire ce qu’on sait déjà que même si les keufs n’se font pas toujours supplier pour foncer dans l’tas… y a du monde derrière qui provoque ça et ce monde c’est lui qui mettait des raclées aux Algériens et à tous les basanés avant de les virer dans la Seine un certain 17 octobre 1961

Ouais… moi les commerçants de la Gare du Nord je n’les aime pas et je n’suis pas la seule… pas plus que tous ces gens qui exhibent des choses très cher devant le nez des jeunes et de nous autres qui ont pas les moyens… et alors qu’est-ce qui se passe à votre avis ?… Toute cette société de consommation c’est une grosse ogresse au derrière énorme qu’est assise vautrée sur notre soleil les frangins ! Faut la virer de là !Suite de l’histoire de la Gare du Nord samedi soir c’est-à-dire avant-hier et c’est là qu’on se marre ! Mais d’abord un détour pour vous causer de notre visite samedi à Louis et à moi de la Cité Nationale de l’Histoire de l’Immigration… majuscules parce que les immigrés ils les méritent bien et que dans ce joli lieu on les leur rend, pas trop tôt ! Cette cité elle est superbe même si elle manque carrément d’éléments qui se trouvent dans les mairies et autres de banlieue, sur le peuplement des bidonvilles cités d’urgence cités dortoirs et tout ce qu’on connaît tellement par le cœur nous autres…

Ouais elle est très réussie la cité de l’immigration et elle a réalisé pour s’installer un retournement de situation génial qui consiste à utiliser l’ancien « musée permanent des colonies » construit en 1931 lors de l’exposition coloniale internationale qui a eu lieu au Bois de Vincennes, devenu ensuite « le musée permanent de la France d’outre-mer » puis « le musée des Arts africains et océaniens », ce bâtiment extra de la Porte Dorée qui emprunte à l’art architectural d’Afrique du Nord du Moyen-Orient et de l’Afrique, pour installer enfin la mémoire de ceux qui ont contribué à construire ce pays, à le défendre et à nourrir sa culture et sa langue dans un espace qui leur revient…

Un grand salut de notre part à celles et ceux qui ont osé ça dans une époque de chasse à l’étranger et de fantasme crétin de l’invasion ! On était assez nombreux à faire la queue samedi alors y a une chance que la bêtise haineuse des bouffons n’ait pas encore tout digéré par ici et que les Gaulois qui ont comme nous grandi avec des mômes venus de partout ne laissent pas leurs potes se faire virer de chez eux !

Une fois bien crapahuté à l’intérieur de la cité il fallait qu’on se rentre dans la nôtre de cité direction la Gare du Nord pardi… Un samedi qu’est-ce qu’on risque ? Des trains bondés comme d’hab mais on n’avait pas réfléchi que ce soir la grandiose bêtise nationale allait nous rattraper normal ! Arrivés sur notre quai habituel on entend comme les autres très rôdés pourtant aux facéties du style : « pour cause de manque de personnel le train de 18H58 est supprimé… nous vous prions de nous excuser pour la gène occasionnée… «  bla bla bla on la sait on la sait… 

Tiens ils manquent de personnel à la SNCEF ? Et la sono à donf nous reprend les esgourdes : « la SNCEF a le plaisir de vous annoncer dans le cadre de son partenariat avec le Stade de France que le match de rugby bal bla bla… retransmis sur écran géant bla bla bla… » et ça dans toutes les langues de la terre plein les feuilles de choux toutes les minutes pour les deux cents pélerins qui guettent en vain un train…

On finit par le voir se ramener le dur et on s’entasse dedans comme on peut et on part youpi ! Mais non pas youpi vous savez pas ce que c’est vous autres que la bêtise crasse de par ici un soir de match dans une contrée où y a plus d’autre idéal en commun que la chasse aux zimmigris et le sport de masse à la ramasse… A peine arrivés à la seconde station Epinay-Villetaneuse notre dur il stoppe net et il repart plus fois d’animal ! On attend on attend on attend… et au bout de… vingt minutes : « pour cause de malaise d’un voyageur ce train ne prend plus de voyageurs… » Si si c’est vrai je vous baratine pas…

Donc on descend tous les femmes les mômes les vieux et nous sur le quai les deux cents et plus et on voit arriver un autre train bourré à bloc dans lequel les voyageurs abandonnés entreprennent de grimper… c’est du Céline au Danemark pour de vrai j’vous assure… Nous très peu l’ami Louis et moi on en a ras le burnous et on décide de se le faire à pieds tant pis ça fait du 4 kilomètres genre comme ça vu qu’on est de l’autre bout d’Epinay Hop Hop !…

Autant vous dire que durant toute la balade on a pas croisé un seul bus et que notre 154 notre autobus des brousses il était lui aussi de sortie « faute de personnel… » Encore faut pas s’plaindre ni pleurnicher y pleuvait pas y faisait doux et y avait qu’une heure de marche environ c’est pas si pire… En arrivant on s’est jetés sur le frigo et on s’est fait une super bouffe de riz et poisson pour se remettre… l’Afrique c’est ça mais là-bas sans doute que c’est pas seulement quelques kilomètres dans les pattes enfin c’qu’on imagine… Et ne croyez pas qu’après ça on se désolidarise de la grève de jeudi au contraire ! La Gare du Nord c’est un territoire formidable et on a pas fini d’y danser nous les p’tits rats au museau rose fendu les chiens des vigiles et tous ceux qui aiment vivre ensemble !

Et à Ali l'épicier gentil de la cité de La Source qui est reparti direction Alger pour un dernier voyage... Ali à qui tous ceux qui l'ont connu et aimé à la cité et dans Epinay ont rendu hommage dimanche soir on dit nous aussi l'ami Louis et moi avec de la tristesse et le coeur très gros : Merci Ali...

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12 octobre 2007 5 12 /10 /octobre /2007 18:18

                                 

Vendredi, 12 octobre 2007  Diabolic naissance…

      Un p’tit bouquin qu’on a écrit quand il vous arrive entre les mains c’est toujours un instant féerique qu’on n’peut pas décrire… Celui-ci qui m’est tombé dessus y a une semaine presque et qui a suivi le même parcours audacieux et solitaire que le précédent Café-crème sorti des presses de l’imprimerie Jouve par l’intermédiaire du site www.imprimermonlivre.com il y a un an et demi est un cadeau extra qui m’arrive pour mes dix années d’écriture… Dix ans c’est rien du tout dans ce qui est un vrai métier comme celui des compagnons de la belle ouvrage et que nous autres les mômes d’ouvriers des banlieues on n’a pas oublié du tout… Dix ans d’écriture de ci de là et de galères que tous ceux et celles qui luttent pour faire lire leurs gribouillages scribouillages connaissent trop !

      Y a dix ans c’était Par la queue des diables qui avait squatté ma tête au point qu’il m’empêchait de dormir en boule tranquille dans mon pieux bourré à fond d’hérissons de fennecs et de loutres qu’il mangeait dans mon assiette du p’tit dej mes tartines confiture et qu’il engloutissait mon bol café noir… enfin j’n’avais plus d’espace à moi dans mon gourbi déjà si minuscule et surtout pas la douche ou faute d’éléphant comme Brigitte Fontaine je trouvais qui m’attendaient chaque jour les zimmigrés du bidonville d’Aubervilliers et tous ceux parmi les gens formidables qui ont rempli mon enfance d’ailleurs et de « ici on vit tous ensemble » déjà !

      Donc y a dix piges de ça un truc aussi improbable que l’écriture me sautait dessus et me virait du monde des peintres où je me croyais chez moi Hop ! Hop ! et voilà… Aujourd’hui que je stationne à temps partiel mais quand même très souvent sur le parking d’une cité de banlieue et que je crèche un peu beaucoup passionnément entre ses murs familiers ce dernier p’tit bouquin qui raconte avec la désinvolture du désespoir mué en pirouettes au nez des haineux guignols l’histoire des mômes des banlieues qui préfèrent la rue c’est l’envie de leur dire que nous autres les gamins d’la zone on a des rêves fabuleux planqués au creux de nos terrains vagues et que ça c’est un trésor !

      Ce p’tit livre qui s’appelle Où vont les feux follets de la rue ? vous en avez lu déjà quelques extraits sur notre blog des Diables bleus vous savez l’histoire de Marion et du chien Sentinelle sous la verrière de la Gare du Nord… Si vous avez envie d’en savoir plus vous pouvez aller faire un tour sur le site d’Imprimer mon livre et vous le retrouverez aussi au Salon des Revues dont on vous reparlera bientôt car c’est dans une semaine… ouf c’est loin !            Gare du Nord vous connaissez ?

        Hop ! Hop ! Les pieds sur les rails bleus givrés ils glissent légers et aussi ils manquent d’la faire tomber Marion avec ces godasses de quand elle créchait chez ses vieux c’est pas gagné d’se faufiler à travers les poussières de sable qui chutent des réverbères sur les entrepôts…

        Hop ! Hop ! Marion plus ça va plus elle fréquente ces coins-là autour d’la Gare du Nord et d’plus en plus loin direction d’la banlieue elle trouve des endroits où les autres ont déjà écrit leur nom…

        L’avantage des gares le long du ballast ou des lieux d’ce genre c’est qu’une fois qu’tu as quitté l’espace où les gens ordinaires ils attendent fourmis autour du fanal orange et les vigiles blacks et les chiens l’museau ficelé et les rats assis sur leur derrière c’est qu’y a pas lerche de passants pour t’déranger et qu’y a d’la lumière…

         Les entrepôts des gares la nuit y sont plus lumineux blafards qu’la neige carbonique qui t’mousse dans les mirettes en paillettes d’argent…

         On l’croirait pas mais c’est vrai et Marion avec le chien Sentinelle ça l’arrange bien vu qu’pour l’instant elle a pas d’quoi s’payer la lampe qui éclaire projecteur et qui pèse dans la musette qu’les autres taggeurs y s’débrouillent en l’ayant à plusieurs… Non… elle peut pas Marion et pas plus les bombes de toutes les couleurs…

         Hop ! Hop ! Ouais… pour l’instant les bombes qu’elle a planquées au fond d’la musette militaire Marion c’est seulement du rouge du noir et du blanc…

        - Tu commences avec ça et t’apprends à faire les formes d’abord… et quand tu sauras corretc j’tâcherai de t’en avoir d’autres des couleurs…

           Ça c’est Banou un jeune black qui lui avait parlé vite fait une nuit où ça commençait à geler l’bout des doigts… Elle l’avait pas entendu v’nir sautant bondissant volant sur ses baskets diaboliques pendant qu’elle dessinait son nom à la craie par-dessus l’tag d’un autre qu’avait fait là l’outremer et l’émeraude d’Océan profond profond avec tout au bout l’troupeau d’éléphants blancs qu’attendaient l’aube…

         Elle l’avait pas entendu Marion parc’qu’elle avait pas l’habitude des oreilles toujours ouvertes coquillages pour s’prévenir de l’arrivée des trains de nuit bien avant et Sentinelle non plus qui vagabondait farouche à l’aventure…

        Non… elle l’avait pas entendu Marion… Hop ! Hop !

        - Eh ! fais attention cousine… si t’entends pas un mec qui t’approche derrière m’étonne que tu r’pères l’Amsterdam avant qui t’ait raplatie…

        Ça l’avait fait sursauter Marion c’te voix presque dans son cou et en s’retournant elle a vu qu’du noir c’qui était encore plus incroyable… Banou c’était une grande silhouette black avec la cagoule du sweet et l’foulard on aurait dit qu’c’était aussi sa peau…

        - Pas d’risque qu’y m’voient dans la nuit les vigiles si jamais y z’avaient l’courage… il a dit à Marion quand il lui a passé les bombes… j’suis plus noir qu’leur âme de cirage…

          Et en reluquant la signature que Marion elle avait tracée par-dessus l’outremer océan il a écarquillé le blanc d’ses yeux qui pétillaient allumaient toutes les allumettes brûlées d’l’obscurité… Il a fouillé à l’intérieur d’son sac à dos et il lui a donné juste de quoi mettre la main au monde étrange des taggeurs… Alors  il a ajouté en sifflant un p’tit coup joyeux :

        - Eh la cousine !… c’est trop l’pseudo qu’t’as là… neij carbonik… j’vais t’le piquer moi ça m’ira terrible !…

         Et son rire c’était un rire d’enfance et de joie claire…

        D’abord il lui a refilé rien qu’les deux bombes… une de black et une de blanc à Marion qui savait pas comment faire avec ça dans les mains… Et puis il a sorti une bombe de rouge aérosol d’la couleur d’la savane écarlate autour des éléphants blancs dans la nuit d’la banlieue…

        - Tiens cousine !… le rouge c’est l’sang des taggeurs ! Et fais gaffe à l’Amsterdam hein ! Y va pas tarder…

        Et comme le chien Sentinelle était v’nu voir si y’avait pas un croûton d’sandwich jambon beurre dans l’sac à dos il a ajouté en riant avant d’filer sans bruit sur ses baskets pas croyables :

        - Eh ! l’chien toi t’es un super bon gardien alors !  

         Hop ! Hop ! Neij carbonik !… Neij carbonic !… ”  

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10 octobre 2007 3 10 /10 /octobre /2007 11:54

                                     La belle étrangère

Les arbres de la cité d’Orgemont qu’est dressée ébouriffée hérissée pareille la queue d’l’écureuil à l’Ouest radical d’la bourgade d’Epinay une de celles du 9-3 vous connaissez ? ils sont des veilleurs familiers et camarades de galères des gens et d’la bonne aventure… Et les gens eux ils préfèrent faire leur trou dans c’coin où y a encore des choses à partager avec le nombre qu’ils sont comme une géante ruche d’abeilles jaunes et orange et avec les arbres les piafs et les chemins creux qui s’moquent des réverbères plantés là rien que pour les empêcher de dormir…   

La cité qu’est un royaume à eux en entier comme toutes les cités où vivent les gens depuis qu’y a eu l’urgence de n’plus s’nicher à l’intérieur du fond des taudis du genre de ceux d’Aubervilliers après qu’la grande boucherie les ait tout explosés les gourbis d’l’ouvrier sans les verres de couleur aux fenêtres pour voir dehors moins glauque sans même les verres du tout c’est pareil qu’c’était l’atmosphère des bidonvilles quand les p’tits venaient taper tam tam tatatatam sur l’dos des bidons pour faire la teuf et qu’ils jouaient sautaient pieds nus dans les caniveaux d’écoulement… c’est pareil…

Mais y a plus les bidonvilles d’la misère au cœur d’la banlieue relookée rouge corail d’Afrique suite au rouge sang des ouvriers et travailleurs fiers des quartiers ni leurs tôles à trous passoires où la flotte dégringolait flip flop ! dans les casseroles et ça accompagnait mieux qu’le piano des vieux cinoches au début les raconteurs d’histoires… Y a plus les bidonvilles où les zimmigrés chantaient le soir le mandole entre les jambes et qu’ils les écoutaient avant d’repartir à la course direction les blocks béton gris allumés là-bas les premiers en plein chantier d’poutrelles d’acier et de grues et qu’ils grimpaient écureuils aussi dix mètres vingt les paumes criblées d’échardes de ferraille et qu’ils sautaient vite fait au milieu des sacs ciment entassés ça faisait une poussière terrible sur leur peau mais leurs vieux avaient pas l’temps d’s’occuper… Non… y a plus d’bidonvilles pourtant il leur reste le goût qu’ils ont pour la tchatche et de raconter les histoires…   Elle vient juste de sauter dans l’autobus d’Afrique… le 154 vous savez ?…  

Sauter c’est bien le mot vu qu’elle court à chaque fois pour ne pas le louper et que le dernier bond la précipite à l’intérieur face au chauffeur black dans sa cage de verre sans oiseaux. Ce chauffeur-là c’est celui qui a les dread locks très longues avec au bout des petites perles de verre de couleur jaune et qui l’attend toujours.

Il attend tout le monde d’ailleurs le chauffeur black… les grands-mères qui boitillent sur leurs souliers un peu tordus et leurs genoux arthrose mais quand même elles se dépêchent pour n’pas déranger trop… Les mères de famille blacks avec les grands boubous aux motifs mirages sur des tissus qui carambolent rouge feu ou jaune citron et orange et dedans on se prend les pieds quand on marche vite plus vite encore un petit sur le dos kangourou bien sage qui se balance et la poussette qu’on tasse comme ci comme ça… qu’elle entre au milieu des jambes des gens gentils ils se poussent… plus un ou deux autres petits aussi qui savent déjà et courent… courent… P’tits enfants kangourous dans la brousse de la banlieue qui sauvage nous met la peau en rage.

Il attend tout le monde le chauffeur black qui a des dread locks avec les perles de verre de couleur jaune au bout et ça n’fait pas longtemps qu’il se tape le parcours du bus qui craque couine gémit parce qu’il est très jeune et qu’il a pas l’habitude encore d’la bétaillère des banlieues où on se serre bien tous un peu plus à chaque arrêt comme si on avait peur de se perdre.

Il a pas l’habitude alors il attend en se moquant du temps qu’on doit lui compter serré sur son carnet mais lui il aime mieux les gens et leur sourire quand ils sautent à l’intérieur et qu’ils le regardent. Le chauffeur black pareil à un guerrier sage il a déposé les armes pour traverser le fleuve. Vous comprenez ?…

 

En même temps qu’elle revoit la tête masquée noir blanc du chat du type du rez-de-chaussée hors du carton comme si c’était un totem peint d’Africa… elle se dit que c’est bien un guerrier tranquille le chauffeur black…

Le chauffeur black il porte le masque de bois encore arrondi d’enfance et pourtant si tu conduis la bétaillère d’Afrique de la banlieue il faut pas avoir peur… la chaussée par ici c’est plus troué que les pistes de la brousse qui traversent en bondissant d’un terrier de tamanoir à l’autre des passages de fleuves asséchés aux écailles de poussière ocre rouge avant de foncer sur des termitières géantes qui servent de carrefour…

A suivre...

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11 septembre 2007 2 11 /09 /septembre /2007 21:02

                                      Petites chroniques

 

Mardi, 11 septembre 2007  Le grand voyage d’Ali       D’habitude ces petites chroniques racontent l’histoire de la cité d’Orgemont à Epinay et de nous autres qui y vivons comme nous pouvons… Mais cette fois-ci vous ne m’en voudrez pas s’il s’agit d’une autre cité d’Epinay, la cité de La Source, le drame qui nous touche tous oblige… Bon, pas question de raconter l’histoire d’une cité où on n’vit pas ça serait du chiqué comme on en lit partout ! Mais depuis la semaine dernière vous savez tous que notre ami Ali le personnage principal et fabuleux du film de Chantal Briet Alimentation Générale s’est fait planter dans son épicerie comme l’a dit une dame qui habite La Source…

      Depuis ce jour pas croyable et maudit du mardi 4 septembre y a pile une semaine on essaie de survivre vaille que vaille à notre peine et à cette imposture épouvantable du destin et on se débrouille en y croyant pas vraiment… enfin comme ci comme ça… Mais ce matin on a dû arrêter de se la raconter vu qu’c’était le grand voyage pour Ali qui l’attendait vers l’Algérie où il est né et où il va rejoindre la grande lumière solaire du Sud…

      Ce matin ils étaient très nombreux les Spinassiens et tous ceux venus d’ailleurs pour faire encore un signe à Ali avant son grand voyage et c’est là qu’on a vu qu’un être généreux qui aime les gens n’est jamais seul… Drôle d’endroit que je me suis dit cette chambre funéraire des Batignolles juste sous le périph entre Clichy et Saint-Ouen adossée au cimetière qui a le même nom et qui serait plutôt un lieu de douceur au début de l’automne comme ça avec ses platanes très hauts à peine ocre au-dessus de nous. Ouais… drôle d’endroit tout petit face à la foule qui n’arrêtait pas d’arriver et de descendre des cars des voitures et aussi ceux comme moi qui étaient partis tôt avec leurs pieds pour avoir le temps…

      Jamais j’ai eu autant l’impression que ce matin de ressentir dans les tripes et dans le cœur tout chamboulé c’que c’est qu’une cité de banlieue avec ce qu’elle a de vraiment formidable et que j’aime trop ! On aurait dit que les gens ils étaient venus de partout et qu’ils trouvaient ça évident d’être là ensemble et qu’ils étaient plus différents… J’ai repéré d’abord un groupe de grands Blacks d’Afrique en boubous et à l’écart beaucoup de gens d’origine d’Afrique Noire qui étaient venus ensemble ou seuls des jeunes femmes très belles habillées à l’Européenne ou pas plusieurs garçons avec les dread locks…

 Les Maghrébins eux ils étaient tellement nombreux qu’on n’pouvait pas dire qui du Maroc de Tunisie ou d’Algérie des femmes d’abord plein et une vieille djida avec la gandoura bleue qui s’appuyait sur une canne et qui semblait perdue au milieu d’tout ce silence si lourd… Certaines comme celles de mon enfance à Aubervilliers avec le petit foulard de couleur transparent et les tatouages bleus et derrière les hommes qui se connaissent tous et se saluent les plus vieux avec le costume impeccable et la cravate eux aussi je les reconnais… ils ont le même air grave et résigné qu’à chaque fois qu’on leur a fait du mal… un air doux et bon… des vieux kabyles peut-être ?…

Bien sûr j’pourrai pas les dire tous j’en oublierai et ils ne m’en voudront pas… On était tellement plein d’émotion et de désarroi… Des Français d’ici y en avait aussi pour sûr des amis d’Ali de la cité et des voisins des autres cités comme la nôtre je les ai reconnus mais eux ne me connaissent pas… pas tellement… Des gens simples habillés comme pour aller au turbin et qui ont pris leur matinée parce que c’était obligé sinon ils auraient pas pu continuer à vivre après comme il faut… Ouais… les gens qu’habitent dans une cité de banlieue on se reconnaît facile… on n’fait pas dans le chic dans le branché pas les moyens !… Enfin on a notre style hein faut pas croire mais pas un style de matuvus du tout !

Et puis y avait des personnes venues de Paris ou de banlieues plus rupines mais ils étaient tellement noyés dans le peuple des gens des banlieues comme la nôtre qu’en fait on les voyait presque pas et puis eux aussi ils étaient ensemble avec nous… Parc’que l’amitié et la bonté humaine ça relie les gens entre eux très fort et ça il l’a réussi Ali avant de partir c’était plein d’amour à craquer là-dedans ça en faisait vibrer les troncs des grands arbres de contentement… Y avait même un ou deux Juifs pratiquants eux qui pourtant ne s’mêlent pas d’ordinaire aux autres… Et ça faisait drôle de les voir aller et venir à côté d’un garçon qui portait un Jean brodé multicolore et une casquette avec la veste treillis et le visage du Che dessus… Mais eux aussi ils étaient ensemble…

La seule chose qui pesait vraiment trop sur nous c’était le silence… ouais… le silence c’est pas bon quand on est malheureux ensemble ça écrase… On aurait dû chanter sûr qu’il aurait aimé ça Ali lui qui chantant drôlement bien comme on voit dans le film… On aurait dû chanter mais on a pas osé… dommage !… Quand je suis sortie dehors j’ai vu des jeunes avec le sweet et la capuche qui attendaient et qui étaient là de l’autre côté de la rue parc’que dedans c’est trop… eux aussi ils étaient ensemble avec nous…

En reprenant le métro moi j’avais dans la tête les cérémonies de deuil en Algérie que mes amis Algériens m’ont tant raconté avec les chants les histoires qu’on se dit les verres de thé à la menthe qui circulent les p’tits qui jouent et même les rires et les cris pour faire sortir les djenoun du désespoir et de la peine…

Bon voyage Ali vers le paysage solaire de ton enfance et de tes rêves… Tu ne nous quitte pas ta présence rayonne dans nos cœurs obligé !

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5 septembre 2007 3 05 /09 /septembre /2007 15:29

Petites notes des cueilleurs de lune

A Ali

l’épicier magique de la cité de La Source

Epinay, Samedi, 28 juillet 2007      Quand j’ai commencé à écrire ces petites notes cet été Ali l’épicier magique le donneur de joie de la cité de La Source était bien vivant et ces gribouillis n’étaient pas destinés à être publiés… C’était des mots qui me venaient dans la vadrouille de l’été qui fait de nous dans les banlieues des abandonnés à la bonté solaire rien que ça… Et quand ça vient je n’refuse pas et je range les papiers noirs-blancs dans les cartons des oubliettes à histoires… Une nuit on ira voir peut-être peut-être pas… Et j’les oublie et c’est bien…

Et puis y a eu l’écrasement par la pierre énorme qui broie tout de la bêtise misérable et du désastre… la pierre sans pitié qu’on rencontre trop sur les p’tits chemins buissonniers de nos quartiers partout dans le monde… la pierre d’épouvante normale qui s’installe dans les maisons bidons où il y a de la sermi et de l’infâme au dîner chaque jour et où pourtant la bonté fait résistance…

Et puis y a eu la mort d’Ali et son regard de tendre bienvenue au monde des fous du malheur et de la vie vraie que je n’peux pas retirer de moi comme une traîne d’étincelles rouges qui durent… qui durent… Et ça fait mal trop mal ! Alors quoi faire ?… Quoi dire et à qui ?… A vous autres qui comprenez bien sûr vu qu’Ali vous le connaissiez et vous l’aimiez… Il était ce qui brille en chacun de nous qui vivons dans les cités d’banlieue le matin quand il fait froid quand il fait hard quand il fait de la peine et de la rage !…

Ecrire parce que c’est tout c’que je sais faire pour qu’il demeure présent dans notre maison bidons Ali sa petite lampe joyeuse allumée toujours… tout le jour toute la nuit toujours qu’il ne nous largue pas lui aussi à nos utopies dégoupillées… Ecrire et lui dédier mon prochain bouquin “ A Ali l’épicier magique de la cité de La Source qu’il garde bien l’âme farouche et tendre de nos banlieues… ” ça lui fera une belle jambe !…

Ecrire parce qu’on est trop tristes et que ça pèse sur le cœur sur le ventre sur la peau comme cette saleté d’énorme pierre d’âge et de mort qui habite dans nos maisons bidons et qu’il faut qu’on sorte de là qu’on vire qu’on balance de chacune des favela de chacun des quartier ghetto du monde… et qu’on retrouve enfin notre bonté humaine notre force et notre résistance…

 

 

“ Mais comment peut-on réussir sa vie dans un monde raté ? ”

Cette petite phrase qui m’a sauté dessus je l’ai extraite d’un texte de Michel Polac intitulé “ La mort aux trousses ” tiré du Charlie-Hebdo du 25 juillet 2007…

Cette petite phrase qui peut encore donner à penser pendant que la lune au-dessus de la table où j’écris est tout à fait ronde et claire comme un gros sou d’or pâle et qu’elle éclaire les deux hautes tours de la cité pareilles à des sculptures modernes sous le halo d’un projecteur me fait songer à l’angoisse qui me prend de plus en plus souvent de ne pas avoir “ réussi ma vie ”…

Tiens… c’est bien un truc de poète ça comme réflexion ! Les ouvriers eux… les laborieux qui en ont plein les pognes ils ne se posent pas ce genre de question pour sûr… Ah bon… tu crois ?…

A quoi peut bien être utile quelqu’un qui écrit des mots aussi insouciants que la fumée qui s’étire au-dessus des corps allongés des fumeurs d’opium qui ont la lune pour écritoire… quelqu’un qui écrit dans le métro au milieu des gens qui vont marner à l’intérieur d’un carnet gribouillis… à la table d’un bistrot et pas Le Sélect ni La Closerie des lilas aujourd’hui vous comprenez ?… non un bistrot comme ça de la rue d’ici ou d’ailleurs avec des habitués du p’tit rouge au comptoir et du p’tit noir tout l’temps vite fait sur le zinc et vas- y !…

Ouais… à quoi ça sert d’avoir envie d’inventer un chemin de clair de lune jusqu’à l’âme des gens et de donner l’alarme à ceux qui dorment déjà dans le petit val mouillé de lumière juste avant leur mort ?

A quoi bon les réveiller si on a pas la sagesse des magiciens qui dissimulent une lune de papier sous leur manteau et des épiciers qui se lèvent tôt le matin dans les cités de banlieue avec le café tout prêt pour la bienvenue ? Ou si comme Hélicon à Caligula on est pas capable de promettre à la foule des gens venus de la rue avec des mensonges au parfum de miel qu’on va aller lui chercher la lune ?

J’ai cru longtemps en suivant le modèle des vieux ouvriers qu’il suffisait de se mettre à l’ouvrage pour qu’elle soit belle et qu’elle ait un sens et du coup qu’elle donne du sens à ma vie…

Les compagnons que j’ai eu la chance de rencontrer étaient des êtres généreux et vrais pour qui la belle ouvrage demeurait une manière de s’accomplir que j’imagine semblable à celle du peintre Vincent dans son obstination créatrice et sa quête de la liberté sur le chemin qui l’a mené de la traversée du Borinage où il fréquentait mineurs et paysans jusqu’à la Maison jaune d’Arles…

Sortir de l’insensé où la nuit de mon enfance de banlieue n’avait aucun croissant de lune d’or ni aucune petite lampe pour l’éclairer et au moyen de l’écriture et de mon envie de raconter des histoires ce qui exige un labeur de joaillier des mots tout en légèreté devenir un modeste allumeur de réverbères voilà qui me semblait un destin fabuleux…

Mais nous voici à nouveau sur ne scène travestis du costume de l’insensé. Chacun des rôles que nous acceptons de jouer nous emprisonne un peu plus dans le regard des autres et dans le halo éblouissant des projecteurs et nous sépare de nous-mêmes derrière le fard blanc de notre indifférence…

Les mouvements grotesques des bouffons qui ont envahi notre territoire d’utopies n’ont plus rien à voir avec l’authentique et magistrale pantomime du formidable bouffon Fançouille de Baudelaire dont l’art était d’une telle perfection de l’âme et des sens qu’il en oubliait la mort… Tout comme les ouvriers avaient au fond noir des galeries ou au centre rouge des fournaises d’acier l’intuition d’une force incroyable et vitale… ils étaient loin au-delà de leur destinée humaine !

Dans les années 70 qui sont celles de notre jeunesse rebelle nous croyions vraiment que nous allions imaginer un monde solidaire et neuf et nous n’avions pas assez de couleurs d’images et de mots pour en tracer l’esquisse sur les papiers chiffons vendus très cher que nous allions voler dans un des magasins pour artistes par des nuits de pleine lune…

Aujourd’hui tout ce qu’il nous reste de nos utopies que nous n’osons même plus offrir aux jeunes des quartiers après que la banlieue rouge et noire ait été désertée par l’âme des vieux ouvriers et des maires bâtisseurs de cités-jardins comme Henri Sellier dont les combats fraternels étaient ceux des hommes justes contre la misère du monde ce sont nos dessins et nos histoires sur les papiers chiffons que le lait clair de la lune comme un gros sou d’or pâle noie pendant que l’orpailleur de rêves tamise le rivière de notre mémoire…

Mais… vous allez me dire… quel rapport tout ça avec notre ami Ali l’épicier magique de la cité de La Source qui nous a laissé nous dépatouiller avec ce monde pas drôle à la fin de l’été ?… Eh bien Ali il l’avait lui la réponse à la question du départ… Ouais… Ali il l’a réussie sa vie dans un monde raté… il nous a redonné de l’espoir en l’homme… ce mot qui ne veut plus rien dire… et ça n’est pas rien !…

Quant à moi faute d’avoir réussi ma vie peut-être que je finirai avec mes p’tites histoires par savoir faire entrer un peu de la lueur lunaire entre les fibres du papier chiffons pour la rendre aux gens des rues qui ne la voient jamais vu qu’ils dorment de fatigue avant qu’elle se lève trop tard et que quand ils se lèvent trop tôt pour aller marner son corps a rejoint les iris d’or des chats qui rêvent encore à d’extraordinaires métamorphoses…

     

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4 septembre 2007 2 04 /09 /septembre /2007 16:12

                                             A Ali

      C'est fou ce que les informations données à la radio n'importe laquelle sont humaines quand elles vous balancent une nouvelle qui vous cloue et vous assassine sur place en parlant d'un être qui vous touche comme d'un "fait divers"...

      FIP ce matin : "... un épicier d'Epinay-sur-Seine a été tué ce matin à coups de couteau dans une cité par un SDF... L'homme a été  identifié et capturé.... L'épicier était connu et apprécié des gens de la cité et des alentours... Il avait été le personnage principal d'un documentaire tourné l'hiver dernier dans cette cité de banlieue..."

      Voilà ce qui vous tombe dessus comme une grosse pierre lâchée infâme par le destin qui a choisi cette année 2007 pour nous casser la vie à fond et qui vous écrase sans la moindre compassion... Une pierre quoi... ça n'compatit pas ça assome ça broie ça écrabouille...

      Pas de prénom évidemment et pas de nom cet être qui vient de mourir n'est qu'un "épicier"... Pas de nom la cité non plus et pas de nom le film tourné l'hiver dernier tu parles !... La banlieue c'est innommé ou innommable comme on sait... Mais avec de tels détails ce que je voudrais à tout prix qui ne soit pas la réalité quelle chance minuscule j'ai ?...

      Ali non ! c'est pas possible !... Y a une toute petite chance quand même puisqu'ils z'ont pas dit que c'était Ali ... et pas parlé de la cité de La Source que désormais tout Epinay jalouse un peu à cause de son  Alimentation Générale justement et du film qui a fait connaître des autres gens des autres banlieues cet être rare et bon un peu poète un peu musicien un peu épicier à ses heures qu'est Ali... ils l'ont pas dit alors c'est pas vrai !...

     Ali  en  train de servir le café le matin à Djamaa et à tous les gens qui passent par l'épicerie... les amis...

      Je saute sur le téléphone en me disant que l'ami Louis qui travaille à la mairie annexe d'Epinay et qui connaît toute la ville et les gens comme sa poche sera au courant obligé... Lui il me dira... que c'est pas vrai !... On est allé voir le fil ensemble l'année dernière déjà... dans l'hiver 2006 à l'Espace Saint-Michel... Ailleurs ils ne l'ont pas passé... La banlieue hein ! vous savez... On était fiers ! On était heureux ! Ali est un être magique qui existe mais on dirait un ange des cités... Quelqu'un  qui croit encore à la fraternité humaine et à la générosité toute simple... mais si rare... Et qui vous fait y croire... Un mec pas croyable quoi et que même les jeunes sont épatés !...

      De toute façon c'est pas possible vu qu'Ali il fait du bien à tout l'monde dans la cité... qui pourrait lui vouloir du mal ?...  C'est un raisonnement d'enfant je sais... c'est sans compter avec la saleté de sermi qui s'est installée sur notre dos sur notre ventre depuis des mois depuis des jours !... La sermi et l'injustice sociale qui mettent de pauvres types dans la rue et les rendent complètement oufs de désespoir et de plus rien à perdre... plus rien quoi... C'est compter sans la saleté de destin crasse qui nous poisse d'un bout du monde à l'autre quand on a pas choisi le camp des gagneurs et qu'on préfère être épicier dans une cité de banlieue du 9-3 que dans  une petite ville rupine de n'importe où ...

  

      Le téléphone j'aime pas ça... y a toujours de l'angoisse quand je décroche... L'ami Louis il va me rassurer c'est sûr !... Sa voix je la connais depuis qu'on s'aime on se sent au moindre truc qui fait peine...  C'est pas le genre expansif et bourré de paroles comme moi Louis... il est silencieux et secret comme ces gamins des banlieues qui savent que les mots ça n'sert à rien... Sa voix tout de suite je sais que c'est pire... que c'est bien la pierre qui nous est tombée dessus et qui nous écrase encore un peu plus que les autres jours dans la cité...

      Ali ! Un être qui donnait de l'espoir aux gens chaque jour avec son sourire et sa gentillesse... Et bien plus que ça... Dans un monde où plus personne n'aide personne et où l'existence c'est la galère pour ceux qui ont pas grand chose il était l'exemple du contraire absolu... C'est des gens comme lui qui peuvent dire aux jeunes des cités que le respect et la solidarité dans la zone ça existe et qu'on peut s'en sortir tous ensemble et vivre là nous autres ! Parce qu'on l'a choisi et pas parce qu'on est au rebut Non et Non !

      L'ami Louis est au courant bien sûr... Il me dit les choses... que celui qui a fait ça est un pauvre type malade... qu'on le connaît dans la cité et qu'on ne le croyait pas dangereux... que c'est un drame triste comme on en vit tant nous autres... que ce soir y aura une marche silencieuse à Epinay... Louis il est malheureux bien sûr mais il n'a pas la colère comme moi... il a raison...

      Ce film Alimentation Générale on a fait un article dessus dans notre blog avec ce titre-là dans la rubrique Banlieues à la date du 28/11/2006, si vous voulez le lire et revoir ces images dont toutes celles de cet article-ci sont tirées aussi, c'est un film magique de Chantal Briet qui connaissait très bien Ali.

      Moi rien qu'en vous recopiant les photos je suis malade... La vie parfois c'est rudement dégueulasse !

Alors adieu Ali... grâce à toi la vie dans la cité était plus douce... nous on continue parce qu'il faut bien... et on te fait un clin d'oeil d'amitié tendre parmi les étoiles...

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