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  • : Les cahiers des diables bleus
  • : Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie, d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.
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Saïd et Diana

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Texte Libre

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Image de Dominique par Louis

  Ecrits et dessinés à partir de nos banlieues insoumises toujours en devenir

      Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.

      Bienvenue à vos p'tits messages tendre ou fous à vos quelques mots grognons du matin écrits vite fait sur le dos d'un ticket de métro à vos histoires tracées sur la vitre buée d'un bistrot, à vos murmures endormis au creux de vos draps complices des poussières de soleil passant par la fenêtre entrouverte...

      Bienvenue à vos fleurs des chantiers coquelicots et myosotis à vos bonds joyeux d'écureuils marquant d'une légère empreinte rousse nos chemins à toutes et à tous. Bienvenue à vos poèmes à vos dessins à vos photos à vos signes familiers que vous confierez à l'aventure très artisanale et marginale des Cahiers diablotins.

      Alors écrivez-nous, écrivez-moi, écrivez-moi, suivez-nous sur le chemin des diables et vous en saurez plus...

 

                                          d.le-boucher@sfr.fr


Notre blog est en lien avec celui
de notiloufoublog 2re illustrateur préféré que vous connaissez et on vous invite à faire un détour pour zyeuter ses images vous en prendrez plein les mirettes ! Alors ne loupez pas cette occase d'être émerveillés c'est pas si courant...

Les aquarelles du blog d'Iloufou l'artiste sans art  sont à déguster à son adresse                   www.iloufou.com  

13 mai 2006 6 13 /05 /mai /2006 12:16

Voici un texte écrit à la demande d'une amie et qui devait être une réponse à ce qui m'a été ravi il y a bientôt un an, et qu'on ne cesse de me prendre encore à chaque fois que cela est possible. Il y a tant de gens qui aiment piquer les billes de couleur des enfants... Et la réponse des poètes est toujours poésie, alors voici la mienne...

                             Les chants de Nidaba

      Et comment je pourrais aujourd’hui ne pas me souvenir d’elle ? Elle… jeune princesse noire rencontrée au détour d’une rue de la cité alors que les mouches criblaient nos poubelles de sifflements de balles cet été-là… rencontrée pour la troisième fois quand elles avaient osé me voler son nom…

      Elle à peine sortie de l’enfance et qui rayonnait magique rubis sombre et légère papillon du jour qui naît quand on se lève très tôt ce que je ne fais jamais… Sauf quand les déesses de Sumer viennent me chercher à l’heure où je vais me coucher après une nuit d’écriture à l’aube et ses cheveux de rosée… forcément…
      Mais de Nidaba surgie parmi les coquelicots de nos terrains vagues que le conte a fait champ de blé d’un épi éparpillé par le dieu du vent Enlil qu’en savaient-elles ?
      Qu’en savaient-elles elles qui m’ont volé son nom ?
      Qu’en savaient-elles ?

      Toi… jeune princesse noire dont la peau avait la teinte café-crème de mes petits matins pas encore réveillée quand j’allais marner alors j’avais presque ton âge et il le fallait bien. Alors c’était ce que je croyais et j’avais de la fierté à mettre le réveil à sonner avec celui des ouvriers moi qui n’ai jamais pu me lever de bonne heure…

      La première fois que je t’ai croisée tu sortais d’une bouche de métro et certainement tu venais de finir ta nuit passée à trimer quelque part mais ça n’avait pas d’importance car tu étais née avec la grâce et la grandeur des déesses de Sumer au fond de tes yeux taillés émeraudes étonnantes car dans le Sud ils sont noirs… 
      Ça fait des années de ça et je n’écrivais pas à cette époque… je n’écrivais rien vu que je croyais mon destin d’enfant de banlieue coincé entre les pinceaux qui me servaient de doigts et le cambouis d’une mobylette mon char glorieux qui m’emmenait très tôt le matin gagner mon pain avec les autres…

      Je n’écrivais pas et je ne connaissais rien de Sumer tu parles ! ni de la Mésopotamie non plus… mais je vivais au milieu d’Afrique et de ses contes fabuleux d’où tu me venais pour sûr car c’est moi que tu regardais sur ce trottoir macadam black arrêtée avec mon char glorieux à ta rencontre émerveillée… moi et personne d’autre…
      Tu me regardais et tu m’as souri tes petites nattes tressées fines voletaient au vent sucré doux de ce matin de juin comme les chevelures des épis juste avant la moisson.
      Tu me regardais et c’est à moi que tu venais jeune princesse de Sumer toute vêtue d’un survêtement rouge et tes baskets aussi… mais aucune des filles de ma cité ne te ressemblait… le dieu des vents En-Lil t’avait faite bien reconnaissable par tes yeux émeraude et ton corps qui courait parmi les odeurs lourdes et les balles sifflantes des mouches au-dessus de nos poubelles et j’imaginais déjà que rien ne pouvait l’arrêter.
      Mais qu’en savaient-elles avant que j’entre dans leurs maisons ma musette pleine de tes moissons ?
      Qu’en savaient-elles ?

      C’était un matin d’été la première fois qu’on s’est rencontrées et tu as ri dès que j’ai arrêté avec un freinage qui a fait naître des étoiles de bitume dorées sous les pneus de la mobylette une vieille tout en métal bleu comme on en avait alors mon char glorieux à côté de toi. Et tu as secoué la tête et ça a fait voler tes petites nattes légères pareilles à des épis de juin dans nos terrains vagues d’alors.
      C’est moi qui t’ai proposé d’aller boire un café-crème même si ça devait me mettre bien en retard mais j’avais déjà choisi au milieu des tas de boulots ouvriers qui faisaient de nous des esclaves aux poignets silencieux un qui me permettait de m’envoler zigzaguer me tirer papillon sur le cheval de ferraille toute la journée et les horaires en ces temps de ma jeunesse il faut dire que je m’en moquais drôlement…

      C’est moi qui t’ai proposé et tu as hoché la tête en faisant danser tes nattes légères autour de toi et le soleil qui jouait dans tes prunelles d’émeraude à rattraper à la course l’eau des petits ruisseaux a scellé ce jour-là un pacte de songes entre nous. Un pacte de songes et de sang qui a noué à chacun de nos poignets un cordon de laine rouge… le cordon sacré qui garde le seuil de la demeure d’enfance.
      Mais qu’en savaient-elles ?

      Je ne t’ai jamais demandé de quelle cité tu venais vu que pour moi quand on se quittait tu t’envolais vers une des premières cités de Sumer que je ne connaissais pas et tu partais toujours en courant jeune déesse rouge au bout des trottoirs de macadam black après qu’on ait déserté à cause de la nuit nos terrains vagues qui étaient de grands champs où grimpaient à nos jambes les doigts des herbes folles et des coquelicots…
      Je ne t’ai demandé que ton nom ce matin-là d’été aux parfums encore enchanteurs lilas un peu fanés dans les jardins de l’autre côté des palissades et de tous les chantiers où on déconstruisait la banlieue à coups de poutrelles métal rouillées et de flèches de grues tombées de haut parmi les énormes tas de gravats sacs de ciment sec et crevés aux ventres de marguerites géantes…
      Je ne t’ai demandé que ton nom entre nos deux cafés-crèmes et tu m’as dit de la voix qu’on prend pour raconter les histoires :

      - Nidaba…

A suivre...

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