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  • : Les cahiers des diables bleus
  • : Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie, d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.
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Saïd et Diana

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Texte Libre

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Image de Dominique par Louis

  Ecrits et dessinés à partir de nos banlieues insoumises toujours en devenir

      Les Cahiers des Diables bleus sont un espace de rêverie d'écriture et d'imaginaire qui vous est offert à toutes et à tous depuis votre demeure douce si vous avez envie de nous en ouvrir la porte.

      Bienvenue à vos p'tits messages tendre ou fous à vos quelques mots grognons du matin écrits vite fait sur le dos d'un ticket de métro à vos histoires tracées sur la vitre buée d'un bistrot, à vos murmures endormis au creux de vos draps complices des poussières de soleil passant par la fenêtre entrouverte...

      Bienvenue à vos fleurs des chantiers coquelicots et myosotis à vos bonds joyeux d'écureuils marquant d'une légère empreinte rousse nos chemins à toutes et à tous. Bienvenue à vos poèmes à vos dessins à vos photos à vos signes familiers que vous confierez à l'aventure très artisanale et marginale des Cahiers diablotins.

      Alors écrivez-nous, écrivez-moi, écrivez-moi, suivez-nous sur le chemin des diables et vous en saurez plus...

 

                                          d.le-boucher@sfr.fr


Notre blog est en lien avec celui
de notiloufoublog 2re illustrateur préféré que vous connaissez et on vous invite à faire un détour pour zyeuter ses images vous en prendrez plein les mirettes ! Alors ne loupez pas cette occase d'être émerveillés c'est pas si courant...

Les aquarelles du blog d'Iloufou l'artiste sans art  sont à déguster à son adresse                   www.iloufou.com  

14 janvier 2006 6 14 /01 /janvier /2006 02:46

      Gare du Nord vous connaissez ?


      Lorsqu’on s’était vues pour la dernière fois avec Marion et le chien Sentinelle dans le bistrot juste à côté de la Gare du Nord la nuit où je lui avais donné les baskets rouges elle m’avait causé un peu de ce monde vers lequel elle retournait d’où elle s’était tirée avec joie quand le strapontin s’était refermé clic-clac juste derrière elle et qu’elle était partie au moment où les vents géants s’étaient mis à souffler de partout.
      Moi je pouvais bien visualiser ce qu’elle disait Marion vu que dans la banlieue j’y étais embarquée chaque jour depuis que j’y étais née y a un peu de temps déjà et qu’après avoir bourlingué raide j’y étais revenue moi aussi parce que c’était parmi ces gens-là que j’avais envie de continuer le voyage de l’autre côté des palissades de chantier et tout au bout des terrains vagues de l’enfance.
      Et tout comme elle le disait Marion ça faisait pas très longtemps que les vents géants s’étaient mis à souffler de partout sur nous et que le sable ocre rose fin aux cristaux coupants et glacés comme des écailles de mercure s’était amassé sur les parkings des cités au pied des blocks… Qu’il avait crapahuté par les fentes des palissades de ferraille écartelées… Qu’il s’était glissé faufilé ramené sur les chantiers où les engins abandonnés semblables à de gros éléphants d’Afrique fossiles… les poutrelles d’acier jetées sur les collines de gravats et les tas d’ordures en étaient lentement recouverts mangés dévorés…
      Non… ça faisait pas très longtemps qu’il formait partout et jusqu’au bas des escaliers au cœur des nuits opaques que les réverbères éclairaient plus qu’avec des halos effarés à cause de tout ce sable tourbillonnant des dunes mouvantes qui se figeaient soudain comme vitrifiées par des incendies intenses à l’intérieur où ça bouillonnait de lave folle.
      Ça faisait pas très longtemps qu’il s’était mis à nous submerger tout doux tout doux à la manière d’un désert qui viendrait faire sa place par ici… le sable ocre rose.

      Gare du Nord vous connaissez ?

      Imaginez… ce sable où on s’enfonçait les talons d’abord et puis les chevilles et alors on avait bien du mal à marcher pour rentrer chez nous…
      Imaginez… de grandes pelletées de sable qui saupoudraient les rues des cités les trottoirs macadam black les parkings aux lueurs violettes où les capots des voitures en étaient au matin givrés d’une croûte épaisse…
      Ça faisait pas très longtemps qu’on avait remarqué comme c’était difficile de se déplacer simplement et qu’il fallait faire des efforts que les vieux et les enfants n’pouvaient pas. Et seulement les voitures de police elles qui avaient bizarre changé d’allure et s’étaient équipées d’énormes pneus avec des châssis très hauts quadrillaient les rues de nos cités de plus en plus vite en chassant devant elles d’énormes troupeaux d’éléphants blancs effrayés qui s’évanouissaient au creux de la brume quand elle montait du fleuve amical comme les grands fleuves d’Afrique quand il a plu.
      Oui… les voitures de police elles s’étaient vite adaptées à tout ce sable et ça nous arrivait de devoir sauter vite fait de l’autre bout du trottoir quand elles passaient en hurlant de leur sirène gyrophare car les gerbes de sable ocre qu’elles projetaient sur nous formaient aussitôt des monticules épais qui nous ensevelissaient à la façon d’énormes termitières à l’intérieur desquelles on aurait été engloutis et digérés comme dans un linceul.
      Imaginez… Mais ça n’était pas encore tout à fait le temps où ainsi qu’ils le feraient quelques jours plus tard et que Marion le raconterait à Célestin le libraire de l’Impasse des Deux Anges… ils s’éloigneraient Silence glaçant leurs sirènes après avoir enfermé des jeunes gamins en train de jouer au ballon sur les trottoirs de Macadam city blues sous une carapace de sable pétrifié auquel se mêlait la neige qui les effaçait de nos regards.
      Non… pas encore tout à fait vous comprenez ?

      Ce qui s’est passé ensuite j’aurais pas pu l’imaginer malgré tout c’que je voyais déjà depuis des temps de misère et de folie… des temps sorciers que les jeunes des blocks s’acharnaient à couvrir de couleurs cloués sur les murs béton de nos cités rageuses qui n’pouvaient plus résister aux dunes de sable ocre rose marchant vers elles comme vers les villages d’Afrique à grands pas le géant aux talons secs crevassés de sel.
      Y’avait plusieurs mois depuis que je n’savais pas où elle était passée Marion avec le chien Sentinelle juste à côté…y’avait plusieurs mois que les choses terribles s’étaient jouées sur Macadam City Blues où de fabuleux incendies avaient redonné à nos territoires d’errance et d’infortune le chatoiement singulier de la savane rouge sang sous son pelage d’herbes craquantes avec tout au bout… au loin là-bas… la tribu des éléphants blancs solitaires et prêts pour des noces de neige et de feu.
      Y’avait plusieurs mois que les choses mauvaises avaient commencé mais ce qui s’est passé ensuite personne ne l’avait écrit sur nos murs de papier…
      Non… c’qui s’est passé ensuite dans l’histoire de Marion sa frimousse au rire de lin bleu ses baskets rouges et le chien Sentinelle qui n’la quittait pas comme s’il avait pressenti avant les rats au museau rose fendu assis sur leur queue… oh ! mais juste un peu avant qu’il allait neiger trop fort sur nos murs de papier… personne aurait pu l’imaginer…

      Gare du Nord vous connaissez ?

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